« Le 1er routeur de commutation par paquets TCP/IP au monde dans le réseau militaire ARPANET, précurseur du réseau Internet. » Toute une histoire et une conclusion !
L’an 1969 est très passionnant pour moi pour deux raisons principales :
- C’est l’année où Neil Armstrong a posé les pieds sur la Lune.
- Trois mois plus tard, le 21 octobre 1969, la transmission du 1er message selon la technologie de la commutation par paquets du TCP/IP entre deux organisations américaines (le UCLA et le SRI (Standford Research Institute) plus de 300 miles plus loin toujours en Californie.
Je vais vous parler du deuxième sujet et de ses conséquences ! Notre Michel Gagné du CIMBCC a déjà fait une présentation Découverte traitant en partie de ce que je vais aborder dans cette chronique du CHIP.
Comme l’Internet fut inventé, développé et contrôlé dès le début par les Américains, mes références web et vidéos proposés sont souvent en anglais, sauf pour mes propres commentaires. Les références Wikipédia en anglais sont plus complètes, mais une fois dans la page vous pouvez naviguer vers la version Wikipédia en français, si tel est votre désir. Enfin, certains documents historiques importants sont en anglais.
Je vous propose d’écouter plus loin entre autres, les récits vidéo décrivant le début par Leonard Kleinrock (né en 1934 et toujours vivant), professeur émérite et icône dans le monde de l’Internet. J’ajouterai des commentaires et des images additionnelles importantes dans cet article.
On dit que c’est le 1er message Internet, piloté par Leonard Kleinrock, alors que l’Internet avec un grand I n’existait pas, mais que l’on utilisait le réseau militaire ARPANET ! Il faut savoir que la communication et la transmission par commutation de paquets TCP/IP étaient à l’état de développement expérimental.
En parallèle, une grande bataille historique avec une technologie compétitrice, la commutation par paquets de l’UIT (Union internationale des télécommunications) selon le modèle de l’ISO (Organisation internationale de standardisation) était en développement au début de la décennie 70.
Par surcroît, la 1ère norme internationale X25 fut entérinée en 1976 par toutes les sociétés de télécommunications de la planète. Elle fut mise en application et devint très populaire à travers le monde de 1976 à 2009, notamment avec les services Datapac au Canada et Transpac en France.
Les protocoles de base comme IP et TCP en étaient à leur début, mais n’étaient pas banalisés (pas standardisés) en 1969. Les logiciels et le matériel étaient en développement et promus aux États-Unis. Les premiers standards IP, TCP, l’application Telnet pour l’accès à distance (Remote Login) et le protocole FTP furent introduits ou finalisés dans la première demie de la décennie 70 dans l’Arpanet et plus tard dans l’Internet.
Le courriel Email du TCP/IP et les bases de données se développent graduellement dans le monde de la recherche et de l’éducation aux États-Unis.
Ces applications prennent leur essor dans les entreprises dans les années 80 via des technologies compétitrices comme Envoy100 et Inet 2000 (dont on a perdu trace de nos jours) au Canada et des services grand public en France comme le Minitel.
Entre 1970 et 1990, aux États-Unis, l’Arpanet et le NFSnet rencontrèrent les besoins militaires, de la recherche nationale et du monde de l’éducation.
Le réseau national du TCP/IP de l’Arpanet/NFSnet a explosé en popularité en 1980 aux États-Unis, lorsque le gouvernement fédéral américain a subventionné un système hôte principal avec des ports Ethernet pour chaque université américaine. Ceci a contribué à développer la structure osseuse nationale (Backbone) de l’Internet américain.
L’Internet, le grand réseau mondial, libre d’accès autant pour diverses organisations, le commerce et pour le simple utilisateur explosa de façon exponentielle à partir des années 90 après l’arrivée du World Wide Web ! En 2023, les technologies du TCP/IP et de l’Internet sont omniprésentes et appliquées dans la vie quotidienne.
Revenons au début du Big Bang Internet !
« Le 29 octobre 1969, le futur a commencé. C’est le jour où une équipe de l’UCLA dirigée par l’éminent chercheur et professeur d’informatique Leonard Kleinrock a envoyé le tout premier message sur ARPANET, le réseau informatique que nous connaissons maintenant sous le nom d’Internet. Kleinrock, pionnier de la théorie mathématique des réseaux de paquets sur laquelle repose Internet, est une figure marquante de la création de notre monde numérique.
Comment séminal? Il est récipiendaire de la Médaille nationale des sciences, la plus haute distinction décernée par le président des États-Unis pour ses réalisations scientifiques. En 2012, il a été intronisé à l’Internet Hall of Fame. Et le musée sur le campus qui commémore le rôle central de l’université dans la naissance d’Internet s’appelle The Kleinrock Internet History Center at UCLA. »
Traduction via Google Translate du texte original en anglais du UCLA
IMP – Interface Message Processor
La démonstration a requis en 1969 dans chacune des deux installations informatiques, un ordinateur hôte, un « routeur avec modem intégré dans un immense boitier métallique » nommé IMP et un lien de télécommunication haute vitesse pour l’époque à 56 kilobits par seconde. Pour cette première, un équipement appelé IMP (Interface Message Processor) modèle DDP-516 fut assemblé de toute pièce par la compagnie Bolt Beranek and Newman, par la suite acquise par la société Raytheon.
Ce IMP qui était à la hauteur d’un humain représente le premier routeur TCP/IP au monde qui intégrait un mini-ordinateur Honeywell DDP-516, un modem, un port de communication et toute la quincaillerie nécessaire se rattachant au circuit de télécommunication. Le réseau initial à installer devait relier quatre emplacements universitaires et de recherches.
Ce IMP DDP-516 (que l’on peut qualifier de 1er routeur IP) était rattaché à l’ordinateur hôte SDS Sigma 7 de l’UCLA.
Pour compléter le système à cette époque, il y avait comme terminal de commandes de l’ordinateur hôte, un appareil genre télétype avec clavier et imprimante.
Laissons Leonard Kleinrock nous présenter le IMP dans une vidéo exceptionnelle de 5 minutes.
En quoi consistait le test du premier message ?
Il s’agissait d’établir la connexion point à point via la technologie TCP/IP et transmettre des messages textes permettant à un opérateur du centre d’ordinateur au UCLA de prendre le contrôle à distance du centre d’ordinateur au SRI à Menlo Park, en Californie, quelques 300 miles plus loin.
L’application la plus vieille et connue de l’Internet s’appelle Telnet. Pour établir une session Telnet, il faut faire un LOGIN ou LOG qui est la demande de connexion et pour, ensuite, soit être connecté ou bien recevoir en retour une demande d’un mot de passe.
Lors du premier du test, l’étudiant programmeur Charles S. Kline du UCLA tape L et Leonard Kleinrock demande par téléphone à sa contrepartie au SRI, l’avez-vous reçu (réponse OUI), ensuite le O est tapé et donc la réponse est aussi OUI.
Sauf que le système informatique crash subitement au SRI !
Ainsi, il y a eu 2 caractères consécutifs transmis dans au moins deux paquets IP de données !
D’où l’on dit que le premier message de l’Internet est LO !
D’où le dicton anglais utilisé par Leonard Kleinrock Lo and behold (surprise et émerveillement) en utilisant le Lo comme diminutif de Look.
Laissons Leonard Kleinrock en faire la description historique dans une vidéo de deux minutes.
Document historique : le Registre
Je montre ci-dessous copie du document provenant du registre du centre informatique de l’UCLA lors de ce test historique en 1969 ! L’entrée au registre UCLA est faite par Charles S. Kline, étudiant programmeur, dans le premier registre IMP signé CSK le 29 octobre 1969.
Les quatre premiers IMP reliés à l’ARPANET
Quatre IMP furent commandés pour quatre emplacements de centre d’ordinateurs :
- L’ordinateur SDS Sigma 7 de UCLA de Los Angeles, Californie ;
- L’ordinateur SDS-90 du Stanford Research Institute de Menlo Park, Californie ;
- L’ordinateur IBM 360/75 de l’Université Culler-Fried Interactive Mathematics Center, Santa Barbara, CA ;
- L’ordinateur DEC PDP-10 de l’Université du Utah.
Les IMP ont été construits par la société basée au Massachusetts Bolt Beranek and Newman (BBN) en 1969. BBN a été engagé pour construire quatre IMP, le premier étant prévu à UCLA pour la fête du Travail ; les trois autres devaient être livrés à intervalles d’un mois par la suite, complétant l’ensemble du réseau en douze mois au total.
Un résumé chronologique intéressant de l’Internet, 40 ans plus tard !
Quarante ans après le premier message d’octobre 1969, cet article du site web Phys.org du 25 octobre 2009 expose les vues de Leonard Kleinrock à l’âge de 75 ans ! En 2023, il a maintenant 89 ans !
Robert Lapointe
Mon épouse est fâchée après moi après que j’aie mentionné en début d’article que l’année 1969 fut importante pour moi pour 2 raisons. J’aurais du dire 3 raisons : l’année de notre mariage !!!
Ce n’est certainement pas la première fois que l’informatique a dû causer des remous dans ton couple.
J’ai longtemps passé par Datapac pour accéder à des ordinateurs dans d’autres villes canadiennes. C’était dans le temps des BBS. J’ai gardé mon compte Compuserve jusqu’à ce que l’Internet prenne le relais. J’ai encore un modem à 2400 baud qui traîne dans une boîte avec mon vieux Commodore.
Quand je programmais en Fortran 77 sur ordinateur central en 1988-1989, je devais garder mon espace de mémoire vive en bas d’un mégaoctet. Je ne parlerai pas longtemps des keypunchs IBM que j’ai utilisés en 1972, car je vais me faire traiter d’ancêtre.
Salut Richard,
L’ancêtre c’est moi avec le Teletype à 14 bauds (BPS) au début des années 70 !!!
Et plus tard dans les années 80 un modem à 1200 BPS assez original qu’il captait un poste de radio musique !!! Sérieux.
Je me souviens du BBS du Club informatique dont j’accédais par modem et ligne téléphonique ! Je me souviens d’une réunion au Vieux Presbytère de St-Bruno ou quelqu’un a fait une présentation des protocoles de X et Zmodem pour téléchargement de fichier. Si cette personne se reconnait ou quelqu’un se souvient de son nom, j’aimerais le savoir !
Mon plus grand regret c’est de m’être débarrasser des mon musée de MAC et PC pour chaque générations de DOS et Windows et quelques OS de Apple.
Dans la catégorie des vielles histoires, je me permets de te relancer.
J’ai acheté ma première calculatrice en 1973, une TI-10 de Texas Instruments. C’était durant mon cours d’ingénieur. Tous les étudiants de l’époque ont acheté une calculatrice à l’intérieur de quelques semaines. Les professeurs ont dû ajuster les examens pour tenir compte de cette nouvelle capacité de calcul. Je possède toutefois encore ma règle à calcul datant de 1969 et elle marche encore.
Lorsque j’ai commencé ma maîtrise en 1976, je me suis payé une HP-25 de Hewlett-Packard, avec 49 pas de programmation en notation RPN. Cela fonctionnait bien, mais la mémoire était volatile et il fallait réinscrire les programmes à chaque nouvelle mise sous tension.
Durant mon premier emploi, je me suis acheté une HP-67 qui sauvegardait ses programmes de 224 pas sur cartes magnétiques. C’était vraiment de la qualité comme objet physique. Malheureusement, je me la suis fait voler au cours de mon deuxième emploi.
Je suis alors passé à une HP-41CV que je possède encore. Dans mon troisième emploi, je m’en servais sur le chantier pour calculer les pressions à obtenir lors des essais hydrostatiques pour le pipeline de Trans Québec & Maritimes. Il y a une pression minimale à atteindre au point haut d’un segment de pipeline à tester sans pour autant excéder la pression maximale admissible au point bas. Lors de la mise sous pression, il ne faut pas dépasser la limite élastique de l’acier. Ces décisions étaient prises dans une roulotte de chantier au milieu de la poussière et du bruit.
Un peu plus tard, j’ai modifié ma HP-41CV en soudant deux modules à l’intérieur pour ajouter une horloge au quartz et d’autres fonctions avancées. Cette calculatrice possède quatre ports d’expansion et il est possible d’y brancher un module HP-IL, un sous-ensemble de la norme HP-IB. Il s’agit d’un lien de communication série en boucle fermée. Cela avait été conçu, entre autres, pour l’acquisition de données en laboratoire.
Je me suis amusé à brancher un modem à un adaptateur RS-232C dans la boucle HP-IL de la HP-41CV et je suis entré en ligne avec un ordinateur central comme si j’étais un VT-100. Malheureusement, l’affichage déroulant LCD à 12 caractères de la HP-41 n’était pas un bon partenaire pour l’ordinateur qui s’attendait à parler à un périphérique fonctionnant sur 80 colonnes.
En 1982, j’ai acheté un Timex-Sinclair ZX-81 avec un module d’expansion de mémoire de 16 ko. Je me suis amusé à aller chercher le signal vidéo à l’intérieur pour brancher un moniteur externe sans passer par le modulateur RF misérable fourni avec l’appareil.
Je me suis acheté un Commodore 64 en 1984 que j’ai revendu pour acheter un Commodore 128 que je possède encore. Je l’ai rebranché l’été dernier et il fonctionnait toujours. Il faut dire que ma montre est plus puissante que mon vieux C128. Cet ordinateur est assez surprenant pour l’époque. Il possède deux microprocesseurs, un MOS 8502 à 2 MHz et un Zilog Z80A à 4 MHz. Le système d’exploitation peut être soit Basic V2 (C64), Basic V7 (C128), CP/M 3.0 ou Geos, un environnement graphique de style Windows. Je possède aussi une cartouche qui permet d’opérer sous COMAL, un language structuré de beaucoup supérieur au Basic.
À partir de 1989, j’ai eu plusieurs PC pour ma femme, mes enfants et moi-même. L’an dernier, je suis passé au Mac après avoir très mal digéré l’introduction de Windows 11.
Bravo Richard ! Tu as certainement oublié ta règle à calcul d’ingénieur de l’époque d’avant l’ère du 0 et 1 🙂
Désolé d’avoir mal lu ton texte à propos de ta règle à calcul que tu a toujours ! j’ai égaré ma règle à calcul dans mes nombreux déménagements mais j’ai toujours mon livre des tables de logarithmes.
En fait moi aussi j’en ai acheté une TI à 120 $ trop rapidement en payant 10$ par mois sur ma carte de crédit de gazoline. En dedans de très peu de temps le prix a baissé à 35 $ !
Merci de nous partager ton expérience, Richard. Ça permet de mieux connaître ton bagage informatique.
Bravo Robert, très intéressant et instructif cet article, l’histoire fait partie de mes intérêts. C’est un pan de l’histoire informatique méconnu.
Un errata dans ma description du premier essai d’envoi mais bien expliqué dans la vidéo par Leonard Kleinrock : c’est l’étudiant programmeur Charlie Kline qui était au clavier et qui parlais au téléphone ce soir là vers 22h30 ! Mais c’est le maître d’œuvre Dr Leonard Kleinrock qui raconte le tout dans la vidéo. Dr. Kleinrock n’était probablement pas présent ce soir là ! Beaucoup d’autres tests s’en suivirent dans les jours suivants ! Voilà pour la précision !