Le parcours d’un innocent

Céline Dufresne
mmiCéline Dufresne

Drôle de titre me direz-vous, surtout en sachant à qui il est relié.

Mais ne vous méprenez pas, les débuts de Charles dans les communications l’ont amené à une brillante et glorieuse carrière dans ce domaine.

Dans le cadre du 40e anniversaire du Club, j’aimerais mettre en lumière le parcours de Charles Terreault.

Charles a reçu son diplôme en génie électrique de l’École Polytechnique de Montréal en 1959. Il entre au service de Bell Canada la même année. Il occupera par la suite divers postes chez Bell, Nortel, Télébec et Recherches Bell-Northern. Lors de son passage chez Bell, Charles s’est intéressé aux communications. Mais, quels étaient les moyens de communication en 1959 ?

Il y avait le téléphone, bien sûr, le télégraphe et la radio sans fil (TSF). Ah oui, il y avait aussi le « tuyau de plomberie ». Certains se souviendront que dans le téléroman « La famille Plouffe », diffusé à Radio-Canada entre 1953 et 1959, maman Plouffe communiquait avec sa fille au 2e étage de la maison par l’intermédiaire d’un tuyau de plomberie. Il n’y avait rien d’autre à ce moment.

Que dire aussi de la bande dessinée Dick Tracy qui utilisait sa montre intelligente introduite en 1946 ? Samsung a mis en marché en 1999, un « téléphone de poignet ». Il a fallu attendre plus de 50 ans avant que ce soit inventé. Aujourd’hui, on en est rendu là.

Comment Charles en est-il arrivé à se spécialiser dans les communications, car, à l’époque, le cursus en ingénierie de l’École polytechnique n’avait pas de spécialité pour les communications ou pour l’informatique ? La curiosité ?

En 1960, Charles fait un stage à la SEA (Société d’électronique et d’automatisme) à Courbevoie, en banlieue de Paris, entreprise fondée par F.-H. Raymond, un visionnaire.

Il fut initié à l’informatique sur la CAB 500 (calculatrice automatique binaire), petit calculateur scientifique, doté d’une mémoire à tambour magnétique opérant à 3 000 tr/min et contenant 16K mots de 32 bits, préfigurant l’ordinateur personnel. La CAB 500 était programmée en langage PAF (programmation automatique des formules), développé par Dimitri Starynkévitch à la SEA entre 1957 et 1959.  La machine et le langage étaient plusieurs années en avance sur leur époque, mais Charles n’en avait aucune conscience à ce moment : un innocent en informatique !

Chez Bell Labs, pendant six mois, il acquiert une formation en profondeur sur les nouvelles technologies en télécommunications, suivie de cinq stages de recherche dans différents laboratoires, pendant un an.

Pour un des stages, Charles participe aux premiers essais d’un ordinateur (de General Electric, hé oui) en temps partagé, utilisant des logiciels conçus au Dartmouth College avec comme terminaux, d’abord des télétypes, puis des écrans à rayons cathodiques.

En 1970, comme directeur de la planification de systèmes de transmission chez Recherches Bell-Northern, il prend connaissance de l’article de Charles Kao sur la fibre optique. Dès 1972 est établi un programme de recherche sur cette fibre, en collaboration avec le Centre de recherches sur les communications Canada. Ce fut le début de cette technologie au Canada.

En 1975, il présente les résultats d’une étude de trois ans sur l’évolution du réseau de télécommunications du Canada pour les 20 prochaines années, faite en collaboration avec toutes les entreprises du Réseau Téléphonique Trans-Canadien. Conclusion : le numérique est la voie de l’avenir. Une décision est prise: Numérique: Droit devant ! En l’an 2000, la mission est accomplie !

Dans les années ’80, dans le cadre du laboratoire de la qualité de Bell Canada, installé à Longueuil, qui dépendait de Charles, fut créé un laboratoire de recherche et de vérification sur la qualité des logiciels sous la direction experte de François Coallier. Il s’agissait de savoir si les logiciels étaient bien structurés et modifiables aisément ou, au contraire, s’ils étaient constitués d’informes paquets de spaghetti ! Comment le déterminer, comment améliorer la qualité ? Depuis, ce laboratoire a été transféré à l’École de technologie supérieure.

Charles a pris sa retraite en 1991 chez Bell comme vice-président au développement technologique du réseau, mais il ne reste pas inactif. Il devient professeur titulaire à l’École Polytechnique de Montréal et directeur d’une chaire en gestion de la technologie. En 1996, à sa retraite de Polytechnique, il devient conseiller en gestion de la technologie auprès d’entreprises, institutions et gouvernements.

Charles a adhéré au Club informatique en 2020, en réponse à une invitation de Michel Gagné pour nous offrir une série de conférences sur l’histoire des communications. Il nous offre aussi chaque année une présentation sur les communications.

Charles a maintenant 88 ans et il continue d’être actif.

Je vous invite à prendre connaissance du parcours très élaboré de la carrière de Charles Terreault en cliquant sur ce lien. Vous verrez aussi qu’il a reçu de nombreux titres honorifiques.

Un merci spécial à Robert Lapointe qui a cumulé beaucoup d’informations sur Charles et à Jean-Guy Rens qui nous a permis de reproduire des extraits de son livre « L’empire invisible » où il fait mention de Charles Terreault. Ces extraits seront disponibles en cliquant ici.

Merci, Charles, de nous faire bénéficier de ton immense expérience dans les communications. Tes présentations sont tellement enrichissantes.

Céline Dufresne


Note de l’éditeur

L’empire invisible de M. Jean-Guy Rens a été publié en deux tomes :

Les extraits cités plus haut proviennent de ce dernier tome qui couvre la période de 1956 à 1992.

Ce second tome a été réédité pour couvrir la période de 1956 à 2016 :

R. Gervais

8 réflexions sur « Le parcours d’un innocent »

  1. Article fort intéressant et stimulant – belle reconnaissance de sa carrière également tant professionnelle que citoyenne.

    Merci

  2. Wow, merci Céline d’avoir pris le temps de rédiger cette chronique honorifique sur le parcours professionnel de Charles. Tout un honneur.

  3. Bonjour Céline,
    Wow! Quel bel hommage et quel parcours M. Terreault, je suis très impressionné. J’étais déjà conquis lors de vos présentations, mais avec un tel parcours on en vient à se demander ce qu’on a fait de notre vie!
    Merci Céline et Cie pour ses recherches

  4. J’ai oublié de mentionner que j’ai acheté et lu en 1993 (avant ma retraite de Bell en 1997), les 2 tomes de l’Empire invisible. Deux briques d’environ 565 pages chacun ! L’auteur Jean-Guy Rens parle de Charles dans le tome II (1993 ) de L’Empire invisible.

  5. Merci pour ton bel article Céline.

    Peut-être que je me trompe. Corrigez moi Charles ou Céline, mais je crois comprendre le mot INNOCENT dans le titre ! Possiblement que Charles a mentionné ceci dans ses présentations passées dont j’ai manqué.

    Quand nous sommes jeunes, nous n’avons peur de rien et ne savons pas tout le temps où cela mène ! En somme la hardiesse et l’innocence de la jeunesse.

    Il faut alors foncer et le travail et le talent font le reste !

    Bravo Charles

    1. Le sens original était que, par chance , je me suis retrouvé dans des situations où, je travaillais sur des technologies très en avant de leur temps, sans m’en rendre compte.
      Mais l’autre sens que tu lui as donné me parait également très valable.

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