Petite histoire des interfaces graphiques – partie 2 de 3

Daniel Vinet
mmmDaniel Vinet

Vous retrouverez la première partie de cette petite histoire des interfaces graphiques en cliquant ici.

Dans cette deuxième partie, nous poursuivons notre exploration de quelques-unes des nombreuses interfaces graphiques qui ont vu le jour au cours de l’histoire informatique. Comme vous le verrez, celles-ci ont été toutes aussi nombreuses que variées et même originales. Poursuivons notre aventure.

Les interfaces graphiques … non graphiques ?

Une interface graphique qui n’est pas graphique peut sembler bizarre à première vue, j’en conviens. Au début du fameux IBM PC, les cartes graphiques offraient des fonctionnalités plutôt basiques, imposant ainsi d’importantes limitations de par leurs capacités restreintes. Toutefois, cette limitation a encouragé le génie créatif de certains à penser une interface graphique, mais en mode texte que nous nommons également une interface en mode caractères.

Ainsi, la compagnie Ashton-Tate avait acquis une entreprise nommée Forefront qui fabriquait un logiciel de productivité nommé Framework. Il s’agit du premier environnement offrant une suite bureautique intégrée, c’est-à-dire un traitement de texte, un tableur, une base de données, un générateur graphique, un gestionnaire de fichiers et un logiciel de télécommunication ainsi que son propre langage de programmation nommé FRED, le tout dans une seul produit. Il faut le reconnaître, cela était révolutionnaire à l’époque.

Bien que cet environnement semble graphique, il est entièrement produit avec des caractères textes, il fonctionne avec la souris et les fenêtres sont redimensionnables, non pas au pixel près, soit un point d’affichage à l’écran comme aujourd’hui, mais plutôt à la résolution d’un caractère comme la lettre « A », par exemple :

Ashton-Tate Framework 1.0

Personnellement, j’ai été utilisateur de Framework de la version 2 à la version 4 et j’ai apprécié la qualité de ce produit avant-gardiste. J’ai adoré le côté intégré du logiciel permettant de faire fonctionner, par exemple, le traitement de texte en même temps que le tableur. Bien sûr, il s’agit de monnaie courante aujourd’hui avec des produits comme Windows, Word et Excel. Toutefois, il faut se rappeler qu’à l’époque, sous DOS, nous ne pouvions faire fonctionner qu’un seul logiciel à la fois.

Le logiciel Framework a toujours son lot d’adeptes, un site Internet avec la dernière version disponible et comment le faire fonctionner sous Windows y est indiqué.

En tant que développeur de logiciels, nous avions accès à créer ce type d’interface pseudo-graphique. J’ai personnellement utilisé la librairie Turbo Vision avec le langage Turbo Pascal de la compagnie Borland dans la création de certaines de mes applications. Cette librairie permettait de produire des applications avec interface en mode caractères.  Soit dit en passant, Borland a acquis la compagnie Ashton-Tate en 1991.

Exemple d’application produite avec la librairie Turbo Vision

Naissance d’autres interfaces graphiques

Le temps faisant son œuvre, d’autres interfaces graphiques ont vu le jour. Au milieu des années 80, j’ai également utilisé GEOS (Graphic Environment Operating System) sur mon premier ordinateur qui avait déjà quelques années à son actif, un Commodore 64 de la compagnie Commodore International.

C64 GEOS

Étant donné les faibles capacités d’un Commodore 64, je dois lever mon chapeau aux créateurs de cet environnement. En effet, les ressources du Commodore 64 étaient plutôt limitées. Bien qu’il affichait la mention « 64 », en réalité celui-ci ne disposait que de 49,5 kilooctets de mémoire vive (RAM), soit l’équivalent de 50 000 caractères. Il s’agissait d’un véritable tour de force de pouvoir offrir un tel environnement avec si peu de ressources.

Toujours au milieu des années 80, j’ai également mis à l’essai l’interface GEM (Graphics Environment Manager), développée par Digital Research, sur ordinateur IBM PC. Fait à noter, cette interface graphique a également été intégrée au système d’exploitation TOS équipant les ordinateurs de la famille Atari ST à la même période.

L’environnement graphique GEM

Cette interface n’était pas très tape-à-l’œil par rapport aux autres interfaces produites à l’époque. En revanche, elle offrait une réactivée intéressante.

Atari 1040ST et système d’exploitation TOS (GEM)

De retour du côté de la compagnie Commodore, étant un adepte de la marque dans les années 80, je suis tout naturellement passé au Commodore Amiga. Celui-ci offrait une qualité graphique et sonore peu égalée pour son époque. Son système d’exploitation se nommait AmigaOS. Fait à noter, son principal compétiteur à l’époque était l’Atari ST.

Commodore Amiga 500 et son système d’exploitation AmigaOS

La série Amiga a été produite de 1985 à 1994. Il s’agissait d’un rachat par Commodore de la compagnie Amiga Corporation qui avait baptisé le projet sous le nom de code Lorraine. Les deux entreprises étaient en difficulté financière. Toutefois, Commodore comptait sur ce rachat pour relancer son entreprise, alors que Amiga Corporation n’avait plus de fonds pour lancer le produit. Par ailleurs, ce rachat a fait l’objet d’une dispute juridique entre Atari et Commodore, dispute qui s’est terminée par une entente hors cours.

Au fil des décennies, nous avons vu naître quelques tentatives de ressusciter le produit Amiga, mais aucune n’a été un succès. Par contre, le système d’exploitation AmigaOS persiste aujourd’hui sous les projets MorphOS et AROS, deux systèmes d’exploitation indépendants, mais entièrement compatibles à AmigaOS.

Voilà qui termine cette deuxième partie de la petite histoire des interfaces graphiques. Dans la troisième et dernière partie, nous verrons d’autres interfaces marquantes au fil de l’histoire et nous terminerons avec les plus récentes en vogue. C’est un rendez-vous.

Daniel Vinet

6 réflexions sur « Petite histoire des interfaces graphiques – partie 2 de 3 »

  1. Bonjour Robert.
    Merci de tes bons commentaires et pour ce partage, une autre tranche d’histoire fort intéressante.
    En passant, il s’agissait du Commodore Amiga et non du Atari 😉
    Au plaisir

    1. Oui tu as sûrement raison. Dans cette longue période, il y eu beaucoup de modèles Amiga. Aussi beaucoup de faillites et de rachats. Notamment Commodore a racheté des produits de la startup Amiga Corporation vers 1983. Plus dans les années 90, le modèle Amiga 5000 a supplanté en popularité le Commodore 64. Le Commodore avait des problèmes avec le logiciel Amiga. Commodore a même fait faillite.

      Atari fut concurrencé par la gamme Amiga.

      Il y a eu beaucoup de mouvements et de produits sur plus de 15 ans ! Merci du rappel Daniel.

  2. Merci Daniel! Je suis plus dans la catégorie « utilisateur » et je suis arrivé plus tardivement dans le monde numérique. Mais tu me rappelles de beaux et bons moments de découvertes, mais aussi, je dois l’avouer, de petits cauchemars logistiques. Mais les interfaces ont , pour sûr, su développé ma patience.
    Encore bravo! Tu sais vulgariser des sujets hautement technologiques avec une bonne dose de précision, mais en demeurant humble.

    1. Tu as bien raison Pierre ! ?J’ai aussi bien appris sur toi et tes propres expériences en plus de tes nombreux contenus.

      Il y a beaucoup de gens comme Daniel et toi qui ont beaucoup à dire sur leurs expériences de carrière et c’est très bien. Ajouter du vécu illustre les propos et enrichit la compréhension des autres.

      Personnellement j’aime en entendre les plus possible sur les gens du CIMBCC et leurs réussites. J’en connais plusieurs du CIMBCC dont leur CV plus détaillé mériterait de sortir de l’ombre. Ceci pour le bénéfice de tous.

      Heureusement que le BLOGUE est là pour le partage de tous.

      Être humble et fier ! ?

    2. Bonjour Pierre et Merci beaucoup pour tes commentaires, j’apprécie. Effectivement, l’évolution technologique n’a pas toujours été de toute facilité.

  3. Bravo Daniel,

    Article super bien fait. J’ai déjà hâte à la partie 3 et sa période encore tout aussi sinon plus excitante.

    Dans la 2e partie des années 80 (et même bien avant), le Séminaire des communications Bell pour sa clientèle d’affaires offrait des séminaires avec un animateur supporté par la projection sur grands écrans immenses (3 écrans totalisant environ 6′ x 18′) via un ensemble de projectifs à diapositives préprogrammés. Le plus grand système de projections diapositives au Canada. Le scénario, l’audio et les images étaient conçus par des grandes maisons de productions montréalaise comme Lambert Lepage et Cossette.

    J’ai personnellement animé des séminaires dans un grand théâtre Bell localisé dans la Tour de la Bourse à la Place Victoria !

    À cette époque, j’expérimentais à l’interne Bell avec mes techniciens audiovisuels l’Atari Amiga pour voir les possibilités de l’animation audio-visuelle par ordinateur. Les techniciens de Radio-Canada utilisaient déjà l’Atari Amiga pour animer l’écran. Par rapport à Radio-Canada nous étions vraiment des débutants sur le sujet.

    Durant cette période le IBM PC et ses applications n’arrivait pas à la cheville de l’Amiga. Alors le PC et le MAC furent relégués aux suites bureautique émergeantes comme Lotus 123, WordPerfect et la suite Microsoft pour nos autres besoins dans ce centre de démonstrations en communications informatiques. J’ai eu le privilège de travailler cette tour argentée de 1985 à 1996 !

    Toute une époque dans le monde du travail pour nous deux Daniel ! ?

Les commentaires sont fermés.